Crédit Photo : DANIEL BELOUMOU OLOMO / AFP (Archive)
Une personne en deuil dépose une bougie dans une salle de la Radio Amplitude FM où un portrait du journaliste Martinez Zogo a été placé pour lui rendre hommage, au quartier Elig Essono à Yaoundé, le 23 janvier 2023.
Dix-sept personnes, dont un puissant homme d'affaires et l'ex-patron des services secrets, seront jugées au Cameroun pour le meurtre du journaliste Martinez Zogo, supplicié par un commando des services de renseignement.
Le 22 janvier 2023 était retrouvé le corps sans vie d’Arsène Salomon Mbani Zogo, surnommé Martinez Zogo. L’enlèvement de Martinez Zogo et la découverte de son corps marqué par la torture quelques jours plus tard dans un terrain vague de la banlieue nord-est de Yaoundé avait créé une onde de choc au sein de l’opinion publique et éclaboussé une partie des caciques du régime. A la tête de l’émission "Embouteillages", sur la radio Amplitude FM, le populaire animateur de 50 ans dénonçait les actes de corruption commis par les plus hautes personnalités du pays – aucun puissant n’était épargné, sauf le président Paul Biya, à la tête du pays depuis 1982. L’une de ses cibles régulières était Jean-Pierre Amougou Belinga, accusé par le journaliste de bénéficier illégalement de nombreuses lignes de crédits publics.
Me Charles Tchoungang, chef de file de ce groupe d'avocats : « quand vous voyez l'ampleur que cette affaire a prise et la mobilisation nationale et internationale que les médias ont portée à cette affaire, nous pensons que, pour éviter les embouteillages à l'intérieur de ce tribunal et pour tous ceux qui veulent la connaître la vérité, ce serait souhaitable que ce procès soit télévisé. On a vu en Guinée avec l'affaire Dadis Camara. Parce que quand vous avez chauffé l'opinion à blanc à ce point-là, il est bon que la vérité apparaisse au su et au vu de tout le monde. Car finalement la justice est rendue au nom de qui ? La justice est rendue au nom du peuple camerounais. »
Pour le magistrat, le supérieur de Justin Danwe, Léopold Maxime Eko Eko, ne pouvait ignorer le projet contre le journaliste. Tout-puissant patron des renseignements à la tête de la DGRE depuis 2010, il avait mis sous surveillance Martinez Zogo dès 2015, dans le cadre d’un vaste programme de contrôle des journalistes du pays. Des mises en cause que M. Eko Eko, qui est incarcéré depuis son arrestation le 7 février 2023, a toujours "nié mordicus", souligne l’ordonnance de renvoi. Le tribunal militaire de Yaoundé a retenu l’accusation de "complicité de torture" contre lui. L'influent homme d'affaires camerounais Jean-Pierre Amougou Belinga, réputé proche de plusieurs ministres et hauts responsables de l'État, avait été arrêté peu après le meurtre à Yaoundé, soupçonné d'être impliqué.
L'enquête a connu plusieurs rebondissements et une valse de juges d'instruction, militaires, puisque l'affaire est menée par des militaires et sera jugée dans un tribunal de l'armée. Cinq jours avant l’annonce de la fin de l’information judiciaire, trois membres du service de contre-espionnage camerounais actuellement en détention ont vu les motifs de leur accusation requalifiés. Ces derniers seront poursuivis pour assassinat, deux autres pour complicité d’assassinat. La date du procès pour meurtre de Martinez Zogo n’est pas encore fixée.
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